Expliquer et soigner les addictions : entre neurobiologie et rationalité.
Établissement de soutenance : Université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne, 2021
Pagination : 374 p.
Thème : Toxicomanie-Addictions
Mots-clés : Addiction ; Dépendance ; Comportement ; Neurosciences ; Philosophie ; Médecine ;
Discipline : Philosophie
Région de soutenance : Ile-de-France
Directeur(s) : Huneman, Philippe
Numéro national : 2021PA01H201
Permalien Sudoc : https://www.sudoc.fr/274937557
Accès au texte intégral sous condition : https://theses.fr/2021PA01H201
Résumé : Les comportements addictifs, au même titre que tous les comportements que l'on juge regrettables ou contraires au meilleur intérêt de leur agent, ne peuvent tous échapper à la question de leur rapport à la rationalité. Indépendamment de toute considération psychologique ou neurobiologique, un couple de désir/croyance peut conduire à préférer une action à une autre. Comment se fait-il qu'il puisse produire une action apparemment irrationnelle chez une personne ayant des capacités suffisantes de raisonnement ? Quels sont les désirs et les croyances d'une personne qui a une cirrhose liée à l'alcool et qui va un jour décider de sortir acheter une bouteille de whisky et va la boire en une soirée alors qu'elle était abstinente depuis plusieurs mois ? Cette façon de présenter la problématique addictive ouvre la voie à un troisième « type » de théories explicatives des addictions visant à clarifier son rapport à la rationalité. Ces théories sont intéressantes pour au moins deux raisons. La première est qu'elles font appel à un champ disciplinaire inhabituel en médecine, celui de la théorie de la décision. Ce champ est en fait au confluent de plusieurs disciplines dont le noyau est constitué par l'économie, la psychologie du comportement et la philosophie de l'action. Il a parfois recours aux mathématiques pour constituer des modèles de décisions optimales ainsi que pour prendre en compte la dimension aléatoire de la plupart des décisions. Les aspects de la théorie de la décision ayant plus directement à voir avec la notion de rationalité sont fréquemment traités par des philosophes. Les aspects plus descriptifs impliquent, en revanche, la psychologie voire la neurobiologie. La création de ponts entre ces disciplines est une constante dans ce champ disciplinaire avec le développement de disciplines hybrides : « économie comportementale », « neuro-économie »…Le deuxième intérêt de ces théories est qu'elles permettent de rapprocher les comportements addictifs d'autres comportements potentiellement néfastes pour la santé, et apparemment irrationnels, tels que la non-observance vis-à-vis des prescriptions médicales échappant ainsi à un recours obligé au concept de pathologie. Elles sortent de ce fait les explications de 'addiction d'un cadre qui serait forcément celui d'un dysfonctionnement. On le voit, il n'y a pas d'explication univoque du phénomène des addictions. Si les explications présentées comme « neurobiologiques » sont le plus souvent mises en avant comment étant les plus « avancées » ou le plus pertinentes pour la clinique, cela ne veut pas dire qu'elles sont les plus éclairantes ou les plus utiles pour le clinicien. En particulier, il n'est pas sûr qu'elles soient plus pertinentes que des explications basées sur l'idée que les comportements addictifs sont des comportements volontaires. Le but de mon travail est de procéder à une analyse critique de ces deux types de théories explicatives des addictions en les confrontant à certaines des principales méthodes utilisées pour traiter ces pathologies. Un des objectifs sera de déterminer dans quelle mesure certaines théories ont effectivement contribué au développement de ces traitements ou peuvent être utilisées a posteriori pour comprendre par quels mécanismes ils agissent. [...]